Absence prolongée
Bon,
bon! Après avoir quasiment reçue des menaces de mort parce que je n’écrivais
pas de billet faisant suite à la déclaration d’amour que l’on m’a fait dans un
bar il y a environ un mois, je prends la plume afin de rectifier la situation.
Ce n’était
pas par méchanceté ou motivée par un profond désir de vous garder en haleine
que j’ai tardé à écrire la suite de pareille péripétie. Non. Disons que c’est
une raison beaucoup plus terre à terre qui m’a retenu d’écrire : ma fin de
session.
Donc,
reprenons où le dernier billet se terminait!
« Donc
t’es amoureux?
-Oui.
-Et
crois-tu que tu vas dire à l’Autre la nature de tes sentiments à son
égard? »
Je ne
sais pas où j’avais pu puiser tout ce sang-froid. Cet homme me faisait toujours
un effet dévastateur et je restais sagement là à l’écouter me parler de ses
problèmes de cœur et j’essayais même de le conseiller. Il cessa de regarder le
fond de son verre (qu’il avait fixé tout au long de son discours) lorsque je dis
ma dernière phrase et leva les yeux vers moi. Son regard rivé dans le mien, il
me dit :
« Qu’est-ce
que tu crois que je suis en train de faire? »
Ma vie
ressemble parfois un peu trop à un feuilleton et je suis toujours en train de
me questionner à savoir s’il a du potentiel ou s’il se classe parmi les séries
B. Cette déclaration, je l’avais attendu depuis plus d’un an. Pour la première
fois où je Le croisais par hasard, j’étais en beauté. Et depuis le début de la
conversation j’étais en parfait contrôle de mes moyens. Tout allait tellement
bien qu’il a fallu que je prenne une gorgée de mon scotch au moment où m’a dit
la phrase. D’une prévisibilité pathétique! Ce qui m’amène à me questionner sur
les qualités scénaristiques de ma vie. Au moins je ne me suis pas étouffée et,
mieux encore, je n’ai pas recraché le contenu de ma bouche sous l’effet de ma
surprise. Ça ça aurait été le comble du pathétique prévisible typique d’une
quelconque série B. Je l’ai simplement regardé pendant quelques secondes – qui me
parurent durer une éternité – avec de grands yeux et une drôle de grimace dû à
mes lèvres crispées. Une fois l’effet de surprise passé, je me suis mise à
regarder un peu partout.
« Qu’est-ce
que tu fais?
-Je
cherche la caméra cachée. »
Il a
saisi ma main et m’a dit d’un ton presque solennel :
« Miss,
j’suis sérieux. »
Ses
yeux, ses beaux grands yeux que j’aimais tant… C’était à mon tour de me jeter à
l’eau et de lui déballer la véritable nature de mes sentiments au cas où il ne
le saurait pas déjà. Ce qui débuta comme un monologue devint rapidement un
dialogue entre nous. Dialogue au cours duquel je lui ai mentionné ma récente
rupture et de ma crainte de retomber trop vite amoureuse. Lui que j’avais tant
désiré, la dernière chose que je voulais était qu’il devienne mon « rebond ».
Notre
dialogue s’est terminé à 3 heure du mat avec le last call. Nous avons terminé nos verres et
avons mis nos manteaux. Il était là, devant moi et je le regardais. Il m’a prit
dans ses bras en me serrant doucement contre lui. Je n’arrivais pas à croire
que tout cela venait de se produire. Alors il a murmuré à mon oreille :
« Qu’est-ce
qu’on fait? »